12 hommes en colère, ou la recherche de la vérité objective

En 1957, aux États-Unis, sort le film 12 hommes en colère, réalisé par Sidney Lumet. Son intrigue s’articule autour d’un jury populaire composé de douze hommes, à qui incombe la lourde tâche de décider de la culpabilité (ou non) d’un jeune homme de 18 ans issu d’un milieu défavorisé, accusé d’avoir froidement assassiné son père. Si le jury vote à l’unanimité en faveur de sa culpabilité, il est condamné à la peine de mort, dans le cas contraire, il se verra acquitté.

Au premier abord, en l’espèce au bout de six longs jours de procès, l’affaire parait simple et son dénouement fatalement évident : toutes les preuves accablent l’accusé, il a commis un patricide, crime appelant nécessairement la peine de mort. Un premier vote est effectué, onze jurés votent coupable, mais un, un seul vote non coupable. Non pas qu’il soit intimement convaincu de l’innocence du jeune accusé, mais simplement parce qu’il émet un doute, un doute valable. Un doute qui lui fait estimer que la vie d’un homme mérite bien quelques minutes de réflexion.

S’engage alors un dialogue entre les douze jurés qui, peu à peu, vont s’ouvrir à une réflexion bien plus profonde, qu’ils construisent tous ensemble, dans un grand échange de pensées. L’objectif du juré à l’initiative de ce doute n’est en rien de prouver l’innocence du jeune accusé, mais plutôt d’installer ce doute dans l’esprit de ses collègues, afin de les pousser à réfléchir réellement à l’affaire qui leur est soumise.

Au premier tour de table, sans avoir discuté de l’affaire au préalable, on observe les jurés lever la main. Pour certains de manière assurée et convaincue, pour d’autres timidement, de façon hésitante et laissant supposer qu’ils suivent l’effet de groupe, sans être réellement persuadés de leur opinion. Preuve criante qu’aucun d’entre eux n’a pleinement réfléchi à l’affaire en profondeur ; certains sont sûrs de leur verdict, car forts de leurs préjugés, d’autres sont incertains, mais suivent l’effet de groupe, sans pour autant être totalement convaincus de leur vote.

Observons à présent l’évolution de l’ambiance qui règne dans la pièce où le débat a lieu. Aveuglante de lumière et d’une chaleur étouffante au début du film, elle se transforme radicalement et brusquement par la survenue de la pluie, à l’instant même où le décompte des votes bascule à l’égalité. Six contre six, les opinions penchent de plus en plus en faveur du non coupable, et donc intrinsèquement vers l’effort de la pensée réfléchie et non plus uniquement superficiellement préconstruite. Les esprits s’apaisent, se posent pour réfléchir à froid, à tête reposée, dans une ambiance fraîche, moins aveuglante de lumière et de réactions à chaud.

Quant à la réalisation du film, il est à noter que ce film américain en noir et blanc est sorti en 1957. C’est l’exemple même que l’excellence d’un film ne se mesure pas au budget investi dans sa réalisation, ni au prorata des effets spéciaux qu’il contient. Une table, douze chaises, douze hommes, suffisent ici à captiver le spectateur.

En somme, que vous soyez étudiant en droit ou non, foncez voir ce chef-d’œuvre, il saura assurément vous captiver tout en vous faisant réfléchir !

Marie Rochet