Judy and Punch : violences et outrances

“Père d’un enfant assassiné et mari d’une femme assassinée” : cette réplique ne sort pas de “Gladiator” mais de “Judy and Punch”. Décalée, la référence perturbe. Le deuxième film en tant que réalisatrice de Mirrah Foukles est diffusé au Festival International du Film de la Roche sur Yon en première française. Un film au genre indéfinissable…

Au moyen âge, un couple de marionnettistes, Judy et Punch, joue un spectacle qui soulève les foules. Monsieur s’accapare toute la gloire et madame reste dans l’ombre sans trop rien dire. Jusqu’au jour où l’alcoolisme du personnage masculin lui fait dépasser des limites. Il le regrettera amèrement. Sa femme est retrouvée défigurée par les coups, presque morte. Une communauté de paria fuyant les superstitieux l’accueille dans la forêt. A l’écart du village, Judy mûrit sa redoutable soif de vengeance avant de passer à l’acte.

Parlons des décors du film. Alors que l’histoire est censée se passer en période médiévale, les costumes, les accessoires ou encore la musique ne nous immergent absolument pas dans cette époque reculée. Un policier veille sur le village, casque anachronique sur la tête. Certains personnages fument des cigarettes, ressemblant étrangement aux roulées modernes. Et les musiques sont bien plus imprégnées d’électro actuel que de notes provenant d’un luth ou autre instruments à corde de l’époque.

Au delà des anachronismes, le comique de situation perturbe notre perception du film. Alors qu’un enfant est jeté de manière grotesque par la fenêtre, nous ne savons plus si nous devons rire ou pleurer : la situation est atrocement drôle. Ou drôlement atroce. D’ailleurs, l’actrice interprétant le rôle de Judy, Mia Wasikowska, définit le film comme étant “comique et tragique”.

Cependant, le film énonce une réelle dénonciation de la pensée médiévale. La montée du féminisme au 21ème siècle nous fait prendre encore plus à coeur le traitement des femmes à cette époque. Il est évident que la place des femmes n’était pas celle que nous connaissons aujourd’hui. Judy est dans l’ombre de son mari. Toutes les femmes du village craignent la lapidation en étant traitées de sorcières par la communauté des hommes. Mais au-delà du traitement des femmes, c’est de la pensée générale de l’époque dont il est question dans tout le film. La mort est proche de n’importe qui : du jour au lendemain, une accusation pour des raisons absurdes peut tomber. La violence et la superstition font partie intégrante de la vie moyenâgeuse relatée dans ce film.

On pourra apprécier le point de vue dénonciateur, le parti pris de défense du sort des femmes, beaucoup moins les outrances de certaines séquences, vol planés improbables et saut périlleux irréalistes, plus proches des Monty Python que d’un récit crédible.

Ce film puissant, engagé et totalement décalé ne nous laisse pas indemne en sortant de la salle. Les scènes violentes laissent transparaître la brutalité sociale de l’époque, qui nous fait sensiblement penser à des horreurs actuelles…

Maëlys BRAQUE