[ Culture pub] Edward Bernays, l’homme de l’ombre de la manipulation des masses

Dans un contexte de développement effréné des techniques publicitaires, Edward Bernays, petit-neveu de Freud, sort en 1928 un livre sur son expérience professionnelle : « Propaganda : Comment manipuler l’opinion publique en démocratie ». Portrait qui aurait pu être écrit à l’époque…

C’est à cause de lui que les femmes fument et il aime se vanter de la façon avec laquelle il les a convaincues de le faire. Avec Propaganda, Edward Bernays dévoile les rouages de la machinerie de sa théorie de la fabrique du consentement. Il étaye ses propos avec les campagnes de publicité auxquelles il a pris part, notamment pour le lobby du tabac et son travail pour le gouvernement des États-Unis. Cet expert en relation publique tient un discours sans appel sur l’efficience de ses techniques, qu’il met en application dans son quotidien.

Né à Vienne en 1891, il est le double petit-neveu de Freud : de part son père qui est le frère de la femme de Freud et de part sa mère qui est une des sœurs de Freud. Très tôt, le jeune Bernays s’intéresse aux travaux de son oncle, et écoute avec grand sérieux ce dernier en parler. Plus tard, il rentre à l’université de Cornell et en sort journaliste. Puis il devient par la suite rédacteur et agent de presse. Sa carrière décolle quand il intègre la commission Creel.

Cette commission fut mise en place par le président Wilson en avril 1917 avec un seul but : que l’opinion publique américaine soit favorable à l’entrée en guerre en Europe des États-Unis. Au côté de grands noms du milieu de la communication, Edward Bernays mit en place des stratégies révolutionnaires pour influencer l’opinion publique. En combinant les idées de Gustave Le Bon sur la psychologie des foules, celles de Wilfred Trotter sur la psychologie sociale et celles de Freud sur la psychanalyse, il inonde les États-Unis d’affiches, tracts, films en faveur de la guerre. Il innove en utilisant les personnalités publiques pour appuyer ses discours, ceux qu’il appelle les leaders d’opinions. Une technique qu’il utilisera de nombreuses fois jusqu’à aujourd’hui.

Installé dans ses bureaux de New York en qualité de conseiller en relations publiques, il reçoit les politiques et grands industriels qui requièrent ses services. Prospère en affaire comme dans sa vie familiale, il est marié à l’écrivaine et activiste féministe Doris E. Fleichman.

Auréolé du succès de la Commission Creel, Bernays loue ses services par la Beech-Nut-Packing Company. Cette dernière voulait augmenter la demande des consommateurs en bacon. Bernays eu l’idée géniale de demander à son médecin si un petit-déjeuner consistant pourrait être bénéfique aux Américains. L e médecin a confirmé cette hypothèse, ce qui permit à Bernays d’envoyer une lettre à 5000 médecins à travers les États-Unis pour appuyer l’idée de leur collègue.Cette étude fut ensuite publié dans les principaux journaux et magazines du pays. Dans le même temps, la Beech-Nut reprit cette étude dans ses publicités. La stratégie de Bernays fut si efficace qu’il réussis en quelques années à inscrire le petit-déjeuner composé de bacon et d’œufs dans la culture américaine.

Propagandiste prospère et incontournable, Bernays a assis sa renommée. Sollicité par les grands de ce monde, il applique  ses théories, acquises dans un contexte de guerre, à une société en paix. Edward Bernays, et les relations publiques, ont encore de belles années devant eux. Le bacon, le tabac, et tant d’autres choses…
Bernays, nous veut-il vraiment du bien ? Certainement, puisque nous sommes consentants.

Clément Baudon

Un documentaire d’Arte sur Bernays, qui est décédé en 1995,
et grâce à qui bien de belles choses nous advinrent
(tabac, consommation, mais aussi propagande nazie…) :