[A voir absolument aujourd’hui] « Dilili à Paris » – “Dilili, je suis heureuse de vous rencontrer” – ce vendredi au Concorde à 9h30

Michel Ocelot a encore réussi son coup ! Dilili à Paris est un chef d’œuvre qu’on ne peut pas ne pas aller voir, surtout pour les grands enfants que nous sommes, étudiants composant le comité de rédaction de Hashtag. Empli de couleurs, de musiques, de discours sensés, ce dessin animé est d’une grâce et d’une beauté sans pareil.

Dilili à Paris n’est pas seulement l’histoire d’une jeune Kanake souhaitant sauver toutes les petites filles enlevées par les mâles-maîtres, c’est aussi un voyage dans le temps pour atterrir dans le Paris de la Belle-Époque.

Décor qui n’aurait pas pu être mieux choisi puisqu’il permet un travail incroyable sur l’architecture. Le réalisateur ayant d’ailleurs choisi d’innover quant aux méthodes de création graphique : il a retravaillé avec la 3D des clichés du Paris actuel, pris par lui-même au plus tôt de la journée, et ce, pendant trois ans. On ne peut s’empêcher de noter les lumières matinales et rosées du soleil sur les monuments de la Capitale. Son travail est si réussi qu’à certains moments, on se croirait  dans une peinture de plusieurs artistes de l’Époque.

À ce propos, La Belle-Époque s’est construite grâce à l’émergence de hauts personnages et de leurs contributions. En passant par les arts (Monet, Picasso, Renoir, Marcel Proust, Sarah Berhnart, etc.), les sciences (Marie Curie, Gustave Eiffel, etc.), la politique (Louise Michel, etc.), et grâce à Dilili à Paris on explore un panel de célébrités les plus prestigieuses les unes que les autres.

Mais il ne faut pas oublier l’autre élément-clé de cette période qui sont les costumes : au centre du film, ceux-là sont de véritables bijoux et donnent une touche colorée à l’ensemble de l’histoire, que dis-je, la transforme en véritable arc-en-ciel ! Au point même que lorsque les lumières s’éteignent à la fin de la projection, on voit encore tous ces points colorés danser dans l’obscurité de la salle.

Ce nouveau film est une ode à la femme mais surtout une dénonciation de la maltraitance des femmes et des petites filles (d’après ses mots dans l’émission Boomerang du 9 octobre 2018 sur France Inter). La Belle-Époque est la première étape du long périple que va être l’émancipation des femmes avec notamment leur intégration dans les universités. C’est pourquoi Michel Ocelot a décidé d’en faire le vecteur de son message. Il utilise d’ailleurs les grandes figures féminines de l’époque comme Louise Michel ou Marie Curie. Il ne se contente pas de cela puisque par des détails (une femme portant des bleus au visage) ou des scènes absolument percutantes et parfois choquantes dans leur sens, —comme faire courir à quatre pattes des personnages féminins—, le réalisateur fait passer un message poignant. Ce faisant il nous incite à lutter contre ce drame. Il le dit lui-même : “Si vous vous renseignez sur la maltraitance des femmes, vous perdez le sommeil” (France Inter, Boomerang, 9/10/18).

Mais attention, le créateur ne va pas pour autant complètement dénigrer les hommes et tous les mettre dans la même case, puisqu’il va aussi montrer que certains peuvent changer, sinon qu’ils sont nombreux à ne pas partager la même vision dégradante de la femme.

Le second tour de force de Michel Ocelot est de justement adresser ce discours complexe à un jeune public et parvenir à le faire adhérer à celui-ci. À but éducatif, mais pas seulement : ce dessin animé est un concentré d’Histoire entre les personnages de l’époque, l’architecture, les évènements de cette période, mais aussi la réalité de la société avec l’Exposition Universelle et le Paris miséreux. Pour avoir visionné le film lundi lors d’une séance scolaire, je peux témoigner du fait que tous les enfants yonnais ont d’ailleurs adoré le film et ont compris le message.

Mais si vous êtes un adulte, ne vous faites pas avoir. Dilili à Paris, tel un “Cheval de Troie” (France Inter, Boomerang, 9 octobre 2018), surprend tout ceux qui assistent à ce prodigieux dessin animé. “On ne se méfie pas, et à l’intérieur il y a beaucoup de choses”. Et ce n’est rien de le dire  : entre les références aux personnages de la Belle-Époque, la dénonciation de la maltraitance des femmes, le sentiment de non-appartenance des métisses, la stigmatisation du beau Paris face au Paris miséreux, l’esprit ne sait parfois plus… où donner de la tête.

Au delà, lorsqu’on a été habitué aux précédentes créations du réalisateur telles que Kirikou et la sorcière, Azur et Asmar, Princes et Princesses, Les Contes de La Nuit, on ne peut s’empêcher de remarquer des allusions à ses précédents chefs-d’œuvres. C’est presque un jeu que de les retrouver.

Alors si vous ne savez pas quoi faire au moment des quatre prochaines projections de ce chef d’œuvre (voir ci-dessous), courez à la billetterie du CYEL pour acheter une place. Une fois dans la salle, ouvrez bien les yeux pour contempler ce qui est une nouvelle merveille du cinéma.

Énora Tymen

P.S. : Cela peut paraître cliché mais restez bien jusqu’à la fin et même plus pour une agréable surprise.