Hommages à Charles Aznavour (deux portraits et une chanson)

À la suite de la disparition de Charles Aznavour, Marjolaine Poulain, à partir de diverses sources issues de la presse, s’est livrée à l’exercice du portrait… Quant à la promotion des 1eres années du DUT Infocom de l’IUT de La Roche-sur-Yon, elle a poussé la chansonnette, sous la direction de son professeur (et chef de chœur pour l’occasion), François-Jean Goudeau…

Charles Aznavour : disparition d’une légende
de la chanson française

Après 70 ans de carrière, Charles Aznavour est mort ce lundi 1er octobre à l’âge de 94 ans, laissant derrière lui pas moins de 1400 chansons et sa présence dans une soixantaine de films.

Charles Aznavour, c’était la France. Pas celle d’Edith Piaf ni celle de Charles Trenet, mais une France internationaliste, une terre d’accueil, qui sait enseigner aux enfants de la République les valeurs fondamentales, mais aussi le charme, le romantisme, et une sorte de légèreté. Charles Aznavour fut d’ailleurs l’idole d’une nouvelle génération issue de l’immigration. En matière de métissage musical, Charles Aznavour était un précurseur. « Je me suis intéressé à tous les styles de musique, je suis fier d’avoir été en quelque sorte le premier à en faire en France. C’est pour ça que j’ai eu du succès dans les pays du Maghreb, chez les juifs, les Russes. » confiait-il.

Aujourd’hui, après 70 ans de carrière, il laisse derrière lui plus de 1 400 chansons, dont une centaine d’anthologie, six langues chantées, des milliers de concerts donnés dans quatre-vingt-deux pays. L’universalité d’Aznavour se doit à ses mots, droits, utilisés avec une précision étudiée. Il laisse dans le coeur des français une marque ineffaçable, et il est sûr que des années plus tard on entendra encore fredonner dans les rues : « La bohème… ». Charles Aznavour fut d’abord acteur et ne cessa jamais de l’être, chantant « Danse avec moi » dos à la salle, la main posée sur son épaule comme s’il s’agissait de celle d’une femme, mimant le travesti de « Comme ils disent ». La volupté du vague à l’âme, de l’amour absolu, Aznavour l’avait rencontrée chez Amalia Rodriguès. Pour elle, en 1957, il a composé, lui, le francophone, certaines de ses plus belles œuvres : « Ay  ! Mourir pour toi/À l’instant où ta main me frôle/Laisser ma vie sur ton épaule/Bercé par le son de ta voix. »

Mais Charles Aznavour voulait aussi du drame de la tragédie, de la comédie. Varenagh Aznavourian est mort lundi 1er octobre, à l’âge de 94 ans, ont annoncé ses attachées de presse. Il était né le 22 mai 1924 à Paris, à la clinique Tarnier, dans le 6e arrondissement, de deux réfugiés arméniens. Les Aznavourian viennent alors d’arriver dans la capitale française en provenance de Turquie, via la Grèce. Il y a le père, Mischa, né en Géorgie, fils d’un ancien cuisinier du tsar Nicolas II, la mère, Knar, née de parents commerçants en Turquie, et la fille aînée, Aïda, née pendant l’hiver 1923 à Salonique. Les Aznavourian ont fui le génocide perpétré par la Turquie contre les Arméniens en 1915-1916. Si Mischa, Géorgien, n’a pas été inquiété, Knar, venue de Turquie, a échappé par miracle aux bourreaux. Avec sa grand-mère, elle sera la seule rescapée de sa famille. Apatrides, les Aznavourian sont en attente d’un visa pour les États-Unis, mais ils se prennent d’amour pour Paris, où ils restent. Mischa, baryton, ouvre un petit restaurant arménien rue de la Huchette – sur l’emplacement actuel du Théâtre de la Huchette –, où se rassemblent les exilés d’Europe centrale. Avec sa femme qui est comédienne, ils élèvent Charles et Aïda au milieu des nombreux artistes qui fréquentent l’établissement. En face, il y a l’École du spectacle.

Mis à part sa passion pour Maurice Chevalier, Charles n’a pas de goût particulier pour la chanson. Il veut être comédien. Inscrit à l’Ecole du spectacle, en 1933, il fait de la figuration puis débute dans des petits rôles au théâtre et au cinéma. Finalement entraîné par sa sœur Aïda qui chante, Charles Aznavour découvre les cabarets. C’est réellement dans les années 1940 que Charles commence à écrire des chansons, et non plus des bribes de paroles et de mélodies. Ses premières œuvres sont chantées à la comique : « Il portait un feutre taupé/Il parlait par onomatopées/Il buvait des cafés frappés/Avec des pailles ». J’ai bu, composé en 1945, mais refusé par Edith Piaf et Yves Montand, est son premier grand succès. Georges Ulmer s’en empare et il remporte le Grand Prix du disque français, le premier après la guerre. S’en suit un succès considérable : il intègre en 1946 la «bande à Piaf», embarque pour New York et Montréal où il reste dix mois et produit 11 spectacles par semaine. Après deux ans d’absence, Aznavour revient en France en 1950 et il conquiert Paris, où une trentaine de cabarets ouvre ses portes au chanteur.

« Des articles élogieux dans la presse, je n’en ai jamais eu des masses. Pour être franc, à mes débuts, je n’en ai eu aucun. » Charles Aznavour ira souvent aux Etats-Unis. Prince de Broadway, il y donne des récitals où les chansons originales – comme Au creux de mon épaule, La Bohème, Paris au mois d’août… – sont autant applaudies que leurs versions américaines – The Old Fashioned Way, Yesterday, When I Was Young – qui furent servies par des interprètes prestigieux, tels que Frank Sinatra, Liza Minnelli, Bing Crosby, Ray Charles, Fred Astaire, Roy Clark… ou par lui-même.

Une question se pose alors, Aznavour pouvait-il s’arrêter ? Non, c’était hors de question. Doigts noueux, voix en mode aléatoire, le divin Charles aura chanté jusqu’à sa fin : en effet, peu de temps avant sa mort, il s’est produit au Japon, et le 28 septembre 2018, trois jours avant sa mort, il a donné une interview dans l’émission «C à vous». Cette véritable légende aura ainsi disparu presque sur scène, et restera à jamais dans le cœur des Français.

Marjolaine Poulain

La promotion des A1 2018-2019 rend hommage en amphi
à Charles Aznavour, sous la direction de François-Jean Goudeau

Un second portrait, par Eugénie Gaillard :

L’UN DES DERNIERS GRANDS
DE LA MUSIQUE FRANÇAISE
TIRE SA RÉVÉRENCE

Quatre-vingt quatorze ans et pourtant même la génération Y l’adulait. Charles Aznavour, est décédé le 1er octobre dernier à Mouriès, emportant avec lui les larmes de nombreux fans à travers le monde entier.

« Je ne vieillis pas, je prend de l’âge », voilà ce que répondait Charles Aznavour lorsqu’on lui faisait remarquer qu’il était était peut-être trop vieux pour continuer la vie sur scène. Né Shahnourh Varinag Aznavourian en 1924 à Paris, Charles Aznavour a démarré sa carrière en 1946 à l’âge de 9 ans sur les planches du théâtre du Petit Monde à Paris. Par la suite, se succèderont : sept décennies de scène, 2 100 chansons dont plus de 1 400 enregistrées en huit langues différentes, 180 millions de disques vendus et un nombre incalculable de concerts.

Le célèbre chanteur arménien, victime d’une mauvaise chute durant l’été 2018 avait dû annuler plusieurs concerts mais comptait remonter sur scène le 8 novembre prochain avant d’enchaîner plusieurs dates, en France principalement. Malheureusement, du haut de ses 94 ans, il était temps pour lui de s’envoler « au pays des merveilles » et pour le remercier d’avoir bercé la France pendant 70 ans, celle-ci a tenu à lui dire adieu au cours d’un hommage national le 5 octobre dernier. Hommage durant lequel ont été joué La Marseillaise mais aussi l’hymne arménien, en l’honneur de sa double nationalité.

Une double nationalité auquel l’artiste tenait grandement, il avait d’ailleurs l’habitude de dire « Je suis français, mais l’Arménie, c’est mes racines. Il ne faut pas se tenir trop loin de ses racines. ». Des racines pour lesquelles il était très engagé puisqu’il n’a pas hésité a donné toutes ses économies pour le pays lorsque celui-ci a été frappé par le séisme de 1988. Cet amour pour l’Arménie était partagé par ses habitants qui lui vouent une gratitude sans limite et l’honorent d’une place rebaptisée à son nom à Erevan (la capitale arménienne) et d’une statue à son effigie érigée à Gyumri, la ville la plus touchée par le séisme. Fin 2008, Charles Aznavour recevra même la citoyenneté arménienne, la consécration d’une vie pour l’artiste.

Il a nous a fait rire, il nous a fait pleurer, il nous a ému mais surtout il nous a rendu heureux. Charles Aznavour est monté sur scène jusqu’à la fin. On l’imaginait centenaire, sur scène, assis à lire ses textes en musique à nous émouvoir de la même manière que la toute première fois. Pourtant, le temps des adieux est venu mais ce n’est pas pour autant que son nom sera oublier. Charles Aznavour est une légende et les légendes ne meurent jamais ; elle continuent à se perpétuer avec le temps.