[Critique] « Animal », d’Armando Bo – première française ce jeudi au Concorde à 14h15 et samedi à 20h45 au Manège

« Animal », d’Armando Bo (scénariste de Birdman, d’Alejandro González Iñárritu) affiche complet pour la semaine, mais il restait encore hier une chance de le voir samedi ! Alors c’est l’occasion de se ruer au CYEL tenter une ultime fois sa chance aujourd’hui de dégoter sa place. Ce film en compétition internationale au Festival International du Film de la Roche sur Yon est un franc succès. Récit des angoisses d’Inès Roiland, critique troublée…

Avant-hier, mardi 16 octobre, la rédaction vous présentait un des films du jour à voir absolument : Animal d’Armando Bo. Et croyez-moi, la rédaction s’est décarcassée pour pouvoir vous livrer son avis sur le film. La billetterie, hier, affichait complet pour la séance de 20 h 30 et complet également pour la séance de jeudi à 14 h 15, au Concorde. La rédaction étant déterminée à vous offrir un article de choix sur ce sujet que je me suis présentée hier soir penaude, sans billet… Et quelle ne fût pas ma surprise de pouvoir enfin rentrer grâce à la gentillesse du personnel ! Je me suis alors retrouvée devant une salle comble, à l’exception de quelques places, vite attribuées à des dames qui, comme moi, espéraient entrer sans billets.

Et là, c’est la claque ! Presque inexplicable… On ressort de ce film troublé. On vit le film entre angoisse, tensions, hémoglobine et rire parfois (heureusement). Après m’être renseignée pour vous en faire une présentation assez complète hier, je pensais tout savoir du film et je m’attendais à sa fin. Je connaissais déjà les protagonistes, mais une fois sur mon siège et face à l’écran, je suis devenue perplexe, sinon angoissée. Aucune anticipation des actes des protagonistes n’est possible. Tout s’enchaîne. Il m’est d’ailleurs venue une image après la séance :  on est comme emporté dans un entonnoir. Plus les actions avancent, et plus l’issue devient fatidique — et les protagonistes se révèlent au grand jour.

Mais traçons un peu l’histoire pour mieux comprendre et analyser la performance des acteurs : Antoine Decoud est cadre dans une entreprise de production de viande bovine. Il vit avec sa femme Susie et ses trois enfants une vie paisible et rangée. Ils ont une belle maison confortable dans un beau quartier de la ville et  aménagent leur cuisine. Tout semble parfait, quand cette sérénité est perturbée lorsque Antoine Decoud découvre que l’un des ses deux reins a cessé de fonctionner. Deux années passent, et Antoine est d’abord calme et confiant face à cette nouvelle, car il pense que son fils Tommy va lui faire don d’un des siens. Mais, coup du sort (ou manipulation de sa femme), Tommy s’enfuit devant l’hôpital.

Commence alors une lente descente aux enfers. On suit Antoine subir son traitement sous dialyse (sorte d’épuration du sang) et se questionner sur son avenir. Il est loin sur la liste d’attente des personnes attendant un donneur. Pour lui, le système ne fonctionne pas, et il commence alors à chercher un autre moyen de trouver un donneur. C’est sa rencontre avec Elias et Lucy, un couple ayant laissé une annonce sur internet, qui le précipite dans une spirale infernale. C’est un couple de jeunes lunatiques qui vivent dans la pauvreté d’un taudis et sont menacés d’expulsion. Un rein contre une maison : voilà le deal ! Mais ce jeune alcoolique qui mendie pour vivre et sa copine enceinte ne veulent pas n’importe quelle maison. Ils veulent mener la grande vie comme Antoine et sa famille. Et la vie d’Antoine bascule lorsque Elias lui dit qu’ils veulent Sa maison : celle pour qui il a travaillé durement pendant toutes ses années.

Guillermo Francella, acteur populaire argentin, est l’acteur qui joue Antoine Decoud. Et que dire de sa performance ? Une performance d’acteur à la fois impeccable et juste. Et, qui a grandement participé à faire monter mon angoisse. Tout au long du film l’acteur se transforme et Antoine Decoud devient peu à peu un être méprisable et infiniment égoïste. Il est prêt à tout pour obtenir son rein. Et la performance de Frederico Salles et Mercedes De Santis est à l’auteur de celle de Guillermo Francella. Les deux acteurs personnifient Elias et Lucy à la perfection : ils sont imprévisibles et animés par les plus bas instincts. Si Antoine Decoud au début du film est encore un homme, on peut dire qu’Elias et Lucy, eux, sont véritablement des animaux dès le début.

Animal est  incontournable : la bande son est incroyable, la performance des acteurs est à couper le souffle et le scénario imprévisible… Époustouflant (mais pas éreintant).

Inès Roiland

La prochaine projection aura lieu samedi 20 octobre au Manège
et donnera lieu ici à une autre critique, d’Enora Tymen