[Culture ciné par] Clément : « Satoshi Kon : il n’y a pas que Miyazaki au panthéon de l’animation japonaise »
Millennium Actress, film d’animation de Satoshi Kon (2001), au travers de la filmographie d’une actrice déchue parvient magistralement à retracer l’histoire de l’humanité. Une quête poétique et philosophique écrite en abyme selon le style de ce grand maître de l’animation japonaise.
La quête éternelle de l’humanité au travers de la quête d’une vie d’une actrice déchue. Chiyoko Fujiwara a eu une vie bien remplie qu’un journaliste et son caméraman sont venus découvrir pour la réalisation d’un reportage. Elle commence à raconter sa vie lorsque ce journaliste lui remet une clef qu’elle a perdu voilà des années. Son récit alterne entre sa vie d’actrice et sa vie personnelle, prenant le journaliste, le caméraman et nous-mêmes totalement dans l’intrigue. Cette clef lui fut remis par une homme dans sa jeunesse. Dès lors une seule chose l’obsède : le retrouver.
Les mises en scène et en abyme de Kon prennent place dans des décors allant du Moyen Age a un futur hypothétique. Chiyoko Fujiwara, ancienne actrice, nous entraîne dans l’histoire de sa vie et du Japon. Kon a déjà expérimenté cette mise en abyme, un film dans un film, dans d’autres de ses longs-métrages, tel que « Perfect Blue » (1999). Dans « Millennium Actress » ce procédé permet une astucieuse plongée historique tout en restant à l’échelle temporelle de l’héroïne. Cette dernière cristallise dans sa quête de l’homme à la clef les quêtes personnelles de chaque individu composant l’humanité, courant après ses propres chimères. Le message est même plus puissant que cela : ce n’est pas ce après quoi nous courons qui importe mais le chemin que nous empruntons. La quête de Furijwara l’a fait voyager dans diffèrent pays, du Japon à la Corée, rencontrer de multiples personnes, comme Eiko Shimao, producteur de cinéma impliqué ou Junichi Ootaki un acteur bad boy, contourner des obstacles, comme faire face à l’animosité de rivales à son encontre.
Satoshi Kon livre un film brillant, peignant une fresque émouvante remplie de poésie et de philosophie, centré sur l’humain. Il a réussi à cristalliser un sentiment universel : l’espoir dans un personnage attachant. Seul défaut : le journaliste et le cameraman en apparaissant dans les souvenirs de Chiyoko Fujirama et y interagissant cassent parfois l’immersion. Excepté ce choix scénaristique acrobatique, c’est un sans-faute. Chiyoko au travers de sa vie jalonnée d’événements dramatique incarne la quête incessante de l’espoir. Chiyoko, ne serait-elle pas victime, d’une malédiction que tous nous affrontons ?
Clément Baudon