[Humeur] Le cinéma porte-parole actuel des sujets polémiques ?

En cet avant-dernier jour du festival, force est de constater que l’acte de programmmer des films n’est pas anodin. Aux premiers abords, on ne s’en douterait pas, mais au fil des séances on commence à s’interroger sur le sens de ces films, sur le message qu’ils portent. Et pas à pas, on se rend compte que de nombreux phénomènes de société sont dénoncés : entre féminisme, trafic d’organes, immigrations, et bien d’autres… on en vient à retrouver une certaine forme de cinéma engagé sans qu’il soit forcément « d’auteur », qui plus est et surtout, qui s’intéresse à l’actualité la plus « brûlante » possible, s’émancipant de « l’histoire pour l’histoire », avec une envie manifeste d’influer sur le monde.

On vous en avait parlé lundi dernier déjà avec “Humeur : Dilili… féministe ?” de la dénonciation de la maltraitance des femmes dans Dilili à Paris (2018) de Michel Ocelot, mais au fil que les jours passent et que l’on voit de plus en plus de films, on ne peut s’empêcher de remarquer que la tendance bat son plein. Il suffit de parcourir la programmation du Festival International du Film de La Roche-sur-Yon, riche en avant-premières, premières françaises et inédits pour s’en apercevoir  Animal (2018) d’Armando Bo interroge subtilement sur le trafic d’organes mais aussi sur la fracture entre les riches et les pauvres… Styx (2018) de Wolfgang Fisher aborde d’une manière plus frontale la question de l’immigration… Polisse 20 est encore d’actualité avec la dénonciation du quotidien et des pressions des policiers… What You Gonna Do? When The World’s On Fire (2018) de Roberto Minervini met en lumière les violences faites aux minorités afro-américaines… Of Fathers and Sons (2017) de Talal Derki a pour thème principal l’islamisme radical…  Inuyashaki (2018) de Shinsuke Sato joue avec la place de la technologie dans la société actuelle… Profile (2018) de Timur Bekmambetov dénonce dans son format original la place des réseaux sociaux et de leurs dangers…
Et il doit y en avoir bien d’autres, parfois plus cachés… Force est de constater qu’aujourd’hui rares sont les films qui n’abordent pas un des thèmes ci-dessus… parfois presque par obligation, oserait-on dire.

Alors, le cinéma serait-il devenu le seul moyen de dénoncer une question problématique d’actualité ? Le seul moyen de toucher un public qui perdrait confiance en la politique, mais aussi dans la presse, qu’elle juge manipulée par l’élite ? Ajoutons à cela la prolifération des fake news, —excusez-moi : les infox….  Les réalisateurs qui veulent coller au réel le savent depuis toujours :  la fiction est un des meilleurs moyens d’identification, donc par conséquent un outil idéal pour faire réfléchir et influencer les spectateurs captifs. C’est peut-être aujourd’hui en effet “l’arme” nouvelle de dénonciation idéale dans un monde saturé d’informations présentées comme vraies, mais dont les canaux principaux sont désormais ressentis comme douteux.

En conclusion :  courir dans les salles de cinéma de la Roche-sur-Yon ce n’est pas seulement ouvrir les yeux sur la situation actuelle du monde, mais c’est, quelque part, une façon d’agir pour que cela change. Ce ne sont pas seulement les grandes actions qui vont faire bouger les choses, mais aussi les petites du quotidien, aussi chacun a son rôle à jouer. Celui du réalisateur est fait. Il vous tend son arme. Vous avez la vôtre : le ticket de cinéma*.

Enora Tymen

*C’était aussi la vision du réalisateur de Taste of Cement (2017), Ziad Kalthoum.