Au mois de novembre, nous célébrons tristement la journée mondiale de la prévention des abus envers les enfants (19 novembre), ainsi que celle consacrée aux droits de l’enfant (20 novembre), des droits aussi bien peu respectés dans certaines régions du monde que dans notre propre pays parfois. Nous avons tous une place dans cette lutte, un rôle à jouer, bien que l’on ne sache pas toujours duquel il s’agit. Un sourire, un regard bienveillant, un signalement. Un partage sur les réseaux sociaux qui peut sauver une vie. Aujourd’hui, c’est à mon tour d’apporter ma pierre au rempart contre l’indifférence face à ce fléau. Demain, je ne doute pas que cela sera à vous. Je vous propose de découvrir une nouvelle, une histoire en cinq pages : celle d’un enfant. Peut-être vous, une sœur, un cousin, un voisin. Un enfant qui vit, qui voit, qui entend ces choses dont on n’ose pas parler.

 

Découvrez la suite de la nouvelle écrite par Andréa Louvel, Zéro :

4. La Méfiance

Tu ne sers à rien. Tu ne vaux rien. Tu es juste tellement stupide. La prochaine fois, j’utiliserai des mots plus simples pour que tu comprennes. Je veux dire, regarde-toi. Tu ne peux donc rien faire correctement ? Tout ce que tu fais, c’est te victimiser.
Ces mots ne me sont généralement pas adressés, mais cela fait une demi décennie que je les entends tous les jours. Je ne sais pas pourquoi, Maman ne répond pas ou ne se défend pas. Peut-être en a-t-elle assez d’essayer. Le masque se fissure, j’en ai assez. Il y a eu dernièrement
un changement dans mon esprit. Ma seule obsession est désormais qu’on lui rende la monnaie de sa pièce. J’ai décidé que si la justice ne remplissait pas son devoir, je punirais de mes propres mains le bourreau qui nous fait souffrir depuis trop longtemps. Je n’ai pas l’air d’un assassin. Je pourrais sûrement m’en sortir dans une bagarre, mais pas contre lui. Il est athlétique, grand et prudent. Mais j’ai pris ma décision, je ne fais pas de plans sur la comète. Ma vengeance sera impitoyable et méritée. Tout va prendre fin avec moi.
Le monde fait l’autruche, enterre sa tête dans le sable. Les voisins, le reste de la famille et je pense savoir pourquoi. Personne n’est prêt à entendre de la bouche d’un enfant que ce dernier souffre de maltraitance. Non. Ce n’est pas vrai. La police devrait être préparée à cela. C’est leur boulot, bon sang ! Nous sommes allés plus d’une fois au commissariat, mais jamais une vraie solution ne nous a été proposée. Ils savent seulement nous dire de rentrer à la maison après avoir écrit notre nom dans un fichier qu’ils mettent ensuite de côté, pour avoir des preuves le jour où il commettra l’irréparable. Parfois, ils disent d’un air détendu qu’il suffit de le quitter. Comme si les choses étaient si faciles. C’est ainsi que j’ai commencé à me méfier des gens. Si la seule institution créée pour aider les gens ne bouge pas le petit doigt, nous nous retrouvons seuls. Il ne me reste plus qu’un masque. J’enfile mon masque joyeux quand je quitte la maison. Mon second masque est devenu mon vrai visage. Je nage en plein désespoir désormais.
Il a décidé que nous irions à la plage aujourd’hui, encore une fois. Mais cette fois, nous allons louer un petit bateau. Dans d’autres circonstances, j’aurais adoré cela, mais j’entends déjà son insupportable voix nasillarde et lui-même, faussement enthousiasmé par chaque vague et les ricochets des rayons de soleil sur l’eau, perdu (pour faire bonne figure) dans ses pensées poétiques et pathétiques. Il m’a demandé mon avis hier soir, quand j’étais au lit, en train d’essayer de faire abstraction de la millième dispute de la journée avec Maman. Je savais que l’on irait là-bas, peu importe ce que j’en pensais, alors j’ai juste acquiescé, au bord de l’endormissement. J’ai senti que le moment était venu, mais que je ne préparerais rien, je me laisserais aller. En fait, cela m’a donné une idée.

Suite très bientôt…

 

Je vous souhaite une bonne lecture, et je vous invite à me contacter si vous avez un commentaire à partager sur mon histoire ~ (Instagram : @anddrea.lvl)

 

Article et nouvelle par Andrea LOUVEL