[Critique théâtre] « Et pendant ce temps Simone Veille »
Vendredi 29 novembre avait lieu au Cyel une représentation du spectacle « Et pendant ce temps Simone Veille », proposé dans le cadre de la semaine de lutte contre les violences faites aux femmes organisée par la mairie de la Roche-sur-Yon. Cette pièce, à l’affiche du théâtre du Gymnase à Paris, comptabilise plus de 300 représentations et 50 000 spectateurs.
Cette pièce de théâtre rassemble 4 comédiennes qui retracent ensemble les grandes avancées du féminisme depuis 60 ans. L’une d’entre elles incarne tout au long du spectacle Simone « Veille », qui prend garde à nous rappeler les grandes dates et définitions du féminisme qui ponctuent cette période. Les 3 autres jouent le rôle de femmes des années 50, puis prennent ensuite le rôle de leurs filles, puis de leurs petites-filles… Le tout nous donne ainsi un aperçu de l’évolution sur 4 générations, la dernière correspondant à aujourd’hui.
J’ai personnellement trouvé cette pièce très peu convaincante. Malgré quelques passages résolument drôles et des comédiennes talentueuses malgré tout, la majorité des gags n’auront pas réussi à me faire rire, bien au contraire. La pièce reste uniquement dans la description du féminisme et des typologies de femmes qui se succèdent durant les différentes époques. Les personnages relèvent très souvent du cliché et de la caricature : dans les années 50 par exemple, il y a la femme ouvrière résignée qui enchaîne les grossesses et est battue par son mari alcoolique ; celle qui pense que ce n’est pas utile de travailler et que son rôle est de rester à la maison ; et enfin la bourgeoise, la seule féministe des trois, qui peste car son oncle qui a récupéré l’usine familiale qu’elle avait dirigée pendant la guerre. Quand on pense qu’au début du XXe siècle, les suffragettes rassemblaient tous les types de classes sociales, je trouve dommage de stéréotyper ainsi les rôles et de ne pas avoir fait également de l’ouvrière une femme qui veuille s’émanciper de son destin par exemple. La pièce dans son ensemble ne cherche pas ou peu à affirmer des opinions réellement féministes, et reste juste dans une contemplation de ce qui a pu se passer. À la fin de la pièce, il aurait particulièrement intéressant de parler des enjeux actuels : les féminicides (et le fait qu’à l’heure où j’écris cet article Word me souligne encore ce mot en rouge ?!), le harcèlement de rue, les diktats de beauté, le manque de poursuites judiciaires lors des plaintes…
Je pense que la pièce fait quand même office de piqûre de rappel pour un public peut être moins averti à propos des enjeux du féminisme. J’ai entendu un « Ah ! C’est si récent ? » à côté de moi lorsqu’elles ont rappelé qu’une femme ne peut ouvrir son propre compte en banque que depuis 1965. J’espère que cela aura pu néanmoins développer un nouvel intérêt pour le mouvement chez certains spectateurs.
Pour contrebalancer cette critique plutôt négative, je recommande de suivre le Collectif Marthe que j’ai pu découvrir grâce à leur pièce « Un monde renversé » qui prouve que l’on peut être à la fois résolument féministe et drôle. Un groupe de femmes talentueuses à suivre de très près !
Laurine Roy