[Culture ciné par] Jade : « Les Drapeaux de papier » : un drame social d’une maîtrise étonnante
Premier long métrage du jeune réalisateur Nathan Ambrosioni (19 ans), Les drapeaux de papier est une admirable réflexion sur la réinsertion sociale des détenus non accompagnés.
Découvert en avant première le 17 octobre 2018, au festival international du film de la Roche-sur-Yon Les drapeaux de papier sort officiellement en salle le 13 février 2019.
Inspiré par un témoignage d’un prisonnier en « sortie sèche » de prison, autrement-dit- sans aménagement de peine; ce drame familial met en lumière les liens du sang entre Charlie, une jeune graphiste menant une vie sans excès et son frère Vincent tout juste sorti de prison après douze ans d’incarcération. Si à sa sortie de prison, Vincent retrouve la liberté, il a en revanche tout à redécouvrir, tout à réapprendre et, pour ce faire, il compte sur le soutien de sa sœur. La cohabitation ne sera pas toujours de bonne augure et les excès de colère de Vincent mettront en péril leur relation, mais Charlie est prête à l’aider, c’est son frère après tout. Pour son premier film, le jeune réalisateur va à l’essentiel, il nous épate par sa maturité d’écriture et sa simplicité dans la façon de nous raconter cette émouvante relation frère-sœur.
Rares sont les films si réalistes qui parviennent à offrir autant d’émotions et de réflexions au travers de personnages aussi attachants. Malgré son jeune âge, le cinéaste est parvenu à filmer avec délicatesse ses acteurs, qui sont autres que Guillaume Gouix (Hors les murs), et Noémie Merlant (Le ciel attendra), des talents à la popularité déjà affirmée mais que le réalisateur, Nathan Ambrosioni a réussi à sublimer au travers de son objectif, donnant un rendu réaliste proprement admirable.
Avec ce touchant drame familial, Nathan Ambrosioni semble suivre les traces du réalisateur Xavier Dolan, tant l’univers développé du film rappelle les premiers essais du prodige québécois.
Le long métrage, jalonné de flux et reflux de violences où chaque rancœur et amertume ne peuvent que sortir de façon impulsive et incontrôlable chez Vincent, fait fortement écho aux scènes de colère d’Antoine (interprété par Vincent Cassel) dans “Juste la fin du monde”, réalisé par Xavier Dolan.
Les difficultés de réinsertion quand on sort de cellule, le talentueux autodidacte, les a remarquablement intégrées dans la construction du récit qu’il a imaginé et mis en scène. Une des séquences les plus intenses et saisissantes du film n’est autre que les retrouvailles entre Charlie, Vincent et leur père. Émotionnellement très forte, celle-ci joue sur la convergence des regards et souligne, dans un climat de haute tension, chaque faits et gestes des acteurs par le biais de gros plans, afin de capter chaque respiration, chaque silence, chaque mouvement de tête.
Ce sensible récit d’apprentissage de réinsertion et de reconquête des liens familiaux, questionne autant qu’il dévaste, et incarne une œuvre étonnamment mature.
Jade le Compagnon