[Critique] « Animal », d’Armando Bo (Compétition Internationale) : le film expliqué en 6 lettres – ce samedi à 20h45 au Manège

A-N-I-M-A-L, expliqué en 6 lettres

Mardi 16 était diffusé au CYEL, en avant-première française et même européenne, Animal (2018) d’Armando Bo. Nominé en Compétition Internationale, catégorie qui révèle l’actualité du cinéma contemporain, il a fait salle comble à chaque projection, comme ce soir sans doute… Enora Tymen s’en est pas remise.

Animal d’Armando Bo est un film qui m’a complètement retournée. Pendant très exactement 113 minutes, une multitude de mots se sont battus dans mon esprit pour savoir ce que je ressentais, mais impossible de faire mon choix parmi ceux qui lui correspondaient le plus. C’est en sortant de la séance que m’est venue la réponse : un seul mot ne suffit pas. Alors voici une petit sélection de ceux les plus pertinents.

Mais tout d’abord pour une critique bien complète de ce film évènement, je vous renvoie à celle déjà parue sur Hashtag quelques temps auparavant, et je vous laisse avec la bande annonce qui n’est malheureusement pas disponible sous-titrée ou en français.

A comme acteurs

Pour cette première lettre du titre du film, j’aurai pu choisir Argentin ou même Armando Bo, mais ce n’est pas ce qui marque le plus les esprits même si ce sont des éléments centraux. Mais ce qui fait souvent un film, c’est son casting d’acteurs, et il faut avouer que celui-là est des plus impressionnant, mené par Guillermo Francella, pointure du cinéma argentin. On remarquera tout particulièrement les interprètes de Lucy (Mercedes De Santis) et Elias (Frederico Salles) qui débutent, entre guillemets, dans le milieu, puisque la première n’a qu’un seul film à son actif avant Animal, et le second n’en est qu’à son septième rôle. Pourtant ils arrivent à nous manipuler comme s’ils avaient trente ans d’expérience.

N comme noirceur

Ce terme peut sembler péjoratif mais loin de là… enfin tout est relatif puisque cela reste un thriller ! Mais ici je voudrais parler de la noirceur du propos que tient le scénario du film. Il fallait aussi s’y attendre avec un sujet tel qu’une greffe de rein, même si on aurait plutôt pensé à la couleur rouge, qui est d’ailleurs très présente avec une immersion dans des vaisseaux sanguins à intervalles réguliers, ainsi que lors de scènes dans un abattoir. Cependant, plusieurs scènes viennent ajouter à la noirceur du film avec les jeux de lumière (bureau plongé dans le noir, seulement éclairé par la lumière blanche de l’ordinateur), mais aussi avec le scénario (recherche internet sur le trafic d’organes).

I comme Impensable

En entrant dans la salle avec le peu d’informations qu’on a à disposition (c’est-à-dire une bande annonce en argentin et des critiques de presses espagnoles), on ne s’attend en aucun cas à ce type de films, et encore moins à la tournure que va prendre l’histoire. Jusqu’à la fin, on est comme happé par la fluidité du scénario, et on ne peut en aucun cas prévoir quel sera le prochain rebondissement. C’est un réel tour de force que réalise Armando Bo, mais, en même temps, il fallait s’y attendre, quand on sait qu’il a été le scénariste de Birdman (2014) ou de Biutiful (2010) de Alejandro González Iñárritu.

M comme Musical

Celui-là vous a peut-être surpris ? Vous vous attendiez peut-être à “Maladie” ou “Merveilleux” mais non ! Pedro Onetto, en charge de la musique, a réalisé un travail hors-pair sur la bande originale qu’il eût été bête de ne pas souligner, surtout quand l’intégralité du public s’est mis à chantonner à la fin du film. En même temps, qui ne l’aurait pas fait sur ce classique des Rolling Stones, You Can’t Always Get What You Want ? (Ne vous fiez pas au ton de la musique pour prévoir la fin du film, parce que vous seriez surpris…)
Dans un thriller la bande originale est bien souvent ce qui fait le film. Or Pedro Onetto signe ici un chef d’œuvre quant à la synchronisation des musiques avec l’image, avec un brio parfois complètement décalé ou même surprenant. Et pour les Français, tendez bien l’oreille, puisqu’une musique dans la langue de Molière s’est subtilement glissée dans le long-métrage.

A comme Alarmant

Animal dresse un constat alarmant quant à la société actuelle. Accrochez votre ceinture en vous rendant voir ce film car il soulève de nombreuses problématiques touchant à la santé et la structuration de la société. Tout au long de ce film, on ne cesse de s’interroger quant à la question de la légalité, mais aussi de moralité de l’achat d’un organe (même payé avec une maison). Le protagoniste principal le dit lui-même : “J’ai travaillé et gagné de l’argent honnêtement, pourquoi je n’aurai pas le droit de m’acheter un rein ?”. Mais si on part sur ce constat, seuls les riches pourraient se soigner laissant les pauvres mourir. Et c’est d’ailleurs, le second constat alarmant que fait le réalisateur, entre ceux qui ont les moyens de vivre et ceux qui luttent ne serait-ce que pour manger une soupe brocolis-maïs.

L comme Lauréat

Animal figure parmi les nominés pour la Compétition Internationale et a de bonnes chances de remporter le prix (Mais rien n’est joué encore !). Mais ce n’est pas le seul lien que ce film a avec le terme lauréat puisque son réalisateur, Armando Bo n’est pas un inconnu des cérémonies de ce type. Avec 35 nominations et 23 prix, dont un Oscar pour le meilleur scénario de Birdman (2014) réalisé par Alejandro G. Iñárritu, le réalisateur est une pointure dans le domaine. Ce ne serait donc pas étonnant qu’il se retrouve une nouvelle fois sur scène pour récupérer un énième trophée.