[Humeur] Ça s’est passé près de chez vous (au Festival international du film de la Roche-sur-Yon)
Le festival international du film de la Roche-sur-Yon bat son plein en ce mercredi 16 octobre. On est déjà presque à la moitié de cette 10e édition, et vous n’êtes toujours pas venu voir un film ? Un petit récapitulatif d’une journée au FIF vous en donnera un avant-goût… Étrangement, vous remarquerez que les films interagissent avec notre existence : Claude Lelouch n’a-t-il pas dit que « Le cinéma, c’est la vie en mieux » ? Parfois, il peut même vous améliorer une journée mal partie… Démonstration…, et c’est du vécu.
La veille
Que de films au programme… lequel choisir ? Cette question tournait en boucle dans votre tête et la longue file d’attente lors de l’ouverture de la billetterie. Ce sera une journée chargée. Vous avez choisi d’aller voir quatre films, dont deux ce matin et deux dans la soirée. Votre âme d’enfant vous a poussé à prendre une place pour La fameuse invasion des ours en Sicile, le premier long-métrage de Lorenzo Mattotti, un dessinateur italien que vous connaissez un peu. Pour affiner votre culture cinématographique, vous avez décidé d’aller à la séance d’Easy Rider avec le célèbre Peter Fonda. Ensuite, vous avez choisi Play, un film avec Max Boublil — la bande annonce de cette comédie vous plutôt plu. Enfin, le film que vous attendiez, Le Photographe, de Ritesh Batra —un de ses films précédents, The Lunchbox, était un régal. Alors pourquoi pas aussi ?
Jour J – 8h – J’ai vendu la peau de l’ours…
Mal réveillé, vous vous sentez dans la peau d’un ours surpris en pleine hibernation ce matin là, ça tombe bien : l’ours est à votre programme avec le film de Lorenzo Mattotti La fameuse invasion des ours en Sicile. Cette première séance se déroule plutôt bien dans l’ensemble ; le film et les dessins ont ravi votre âme d’enfant. Le seul bémol, vous n’aviez pas fait attention : la salle était emplie d’enfants. Ces petits oursons s’avèrent remuants, bavards, n’hésitant pas à rejouer les scènes qui les font rigoler. Hélas, ils ne sont pas du tout impressionnés par vos airs d’ours mal léché.
10h30 – Il me faut (deux fois) la Harley de Peter Fonda !
En sortant du Grand R, vous consultez votre planning et votre montre. C’est la panique ! Le film est à l’autre bout de la ville ! Et vous n’avez quelques minutes pour y parvenir ! Mais pourquoi a-t-il fallu que la séance d’avant prenne un peu de retard ? Ou alors n’aviez-vous pas plutôt mal regardé les horaires et mal programmé votre journée… Si seulement vous aviez eu une moto, comme Peter Fonda : vous seriez au Concorde en un rien de temps… Enfin trêve de blabla, il faut courir !
Transpirant et à bout de souffle, vous atteignez le Concorde avec —bravo !— très peu de retard. Vous entrez dans la salle de projection d’Easy Rider éteinte et pleine, en toute discrétion. Ou presque… Vous manquez de trébucher à chaque siège et votre souffle ferait pâlir une tempête. Après avoir attiré le regard courroucé de chacun des spectateurs, vous vous écroulez sur un des premiers fauteuils venus et disponibles. Du coup, vous êtes au premier rang et, de plus, sur le côté. Vous sentez déjà le torticolis arriver… Bon : par chance vous n’avez loupé que la pub du FIF… Mais après tout, vous l’aviez vue juste auparavant lors de la séance précédente… Bref, non, vous n’avez donc rien loupé. Mais tous ces efforts vous ont donné faim… Pourvu que vous n’émettiez pas de gargouillis ! Vous avez déjà la salle à dos, il ne faudrait pas que votre ventre couvre la musique ! Ce qui vous sauve, c’est le bruit des Harley Davidson de Peter Fonda et Dennis Hopper qui couvrent les gémissements de votre estomac.
Vous sortez de la salle en vitesse, le film n’était pas mauvais, mais il ne vous a pas forcément emballé : il tirait un peu en longueur par moments et le scénario était tout de même assez plat. Et puis cette fin, je dirais même plus… Cette faim…
18h – Je ne veux pas que ça s’arrête !
Le soir arrive. Vous êtes de retour au Grand R, comme Max Boublil. Vous vous refaites un petit film de votre matinée, mais la bande annonce de Play est tout de même beaucoup plus drôle que vos petites mésaventures du jour. C’est bon, vous êtes bien placé, reposé, vous n’avez pas faim, tout est parfait… et : waouh, quel film ! Vous en perdez vos mots, vous vous attendiez à un excellent film, il est encore mieux ! Si c’est possible, vous lui donneriez la note de 6 sur 5. Eligible au Prix du public, vous avez l’occasion de voter à l’aide d’un petit carton. Vous avez passé un très bon moment en compagnie du casting qui a su vous faire rire et pleurer à la fois. Vous avez chaudement applaudi le film, très vite suivi par le reste du public. C’est au moment de la ola que, bon…, vous vous êtes décidé à sortir, bien malgré vous… Tout le monde était déjà sorti… Ce n’est plus Play, c’est même Replay que vous voudriez, tellement vous en redemandez.
Il faut tout de même se remettre de ses émotions, et partir tranquillement pour le dernier film. Vous mangez en chemin : cette fois-ci vous avez prévu le coup. Et hop, vous êtes au Cyel ! Mais… Où est passé votre ticket ? Poches et sac retournés, vous le retrouvez, enfin, dans votre portefeuille, ouf ! Mais quel idée de le mettre là ! La séance commence…
Rideau !
Bon… Le Photographe de Ritesh Batra était bien, vraiment très bien. Mais, après celui d’avant… Vous ne pouvez que lui donner quatre sur cinq. Le scénario? Un peu classique, même si l’histoire et les images étaient magnifiques, et comme le dit Rafi, le héros du film lorsqu’il sort d’une salle de cinéma indienne avec son amie, « on connaît très bien la fin de ces films là… »
Voilà… Fin du film, fin d’une journée de festivalier… Vous commencez à avoir les yeux rouges, à force de les avoir rivé sur un écran. Vous avez dans l’ensemble passé une journée riche en émotion et… étonnamment raccord avec les films programmés ! Chéreau a dit, il est vrai, comme en écho à Claude Lelouch, « Le cinéma est le lieu du réel et de la vie ».
Baptiste Rapine