Compte-rendu de la conférence-débat #Journalisme, l’info demain au CYEL, le 15 février
Une conférence-débat sur l’information de demain s’est tenue au Cyel, en fin de journée, jeudi 15 février. Six intervenants ont participé à cet événement afin de partager leurs connaissances et leurs points de vue.
Quel avenir pour le métier de journaliste et le monde de l’information ?
Internet a eu un effet immédiat sur la presse régionale. Les petites annonces ont perdu en valeur depuis qu’elles ont été mises sur des blogs ou d’autres sites web. Les publicités commerciales se sont installées sur les plateformes de réseaux sociaux et les moteurs de recherche. La gratuité de l’information a fait polémique et a lancé des débats sur les métiers du journalisme. « Je rappelle tout de même qu’Internet a été créé par des universitaires et des militaires, ils ne se sont donc jamais penchés sur la question de diffusion de l’information au public », a rappelé Jean-Marie Charon, sociologue des médias. Aujourd’hui, une grande partie du public ne parle plus de média mais de plateformes, soit les réseaux sociaux ou Youtube. Ces nouveaux supports de communication laissent perplexes un grand nombre d’utilisateurs, ils se demandent comment trouver une information pertinente parmi tant d’autres.
Ces nouveaux dispositifs ont eu un impact sur le nombre de journalistes, beaucoup de postes ont été supprimés pour diminuer le coût rédactionnel. « Aux Etats-Unis, le métier de journaliste disparaît alors qu’en France, on constate encore que beaucoup d’élèves souhaitent intégrer nos écoles mais les formations sont de plus en plus courtes », a-t-il constaté. Le sociologue a aussi relevé plusieurs types d’information. Dans un premier temps, les consommateurs relèvent une information « pauvre » mais la partagent qu’elle soit vraie ou fausse, et le font en grand nombre dans le but d’avoir beaucoup d’audience. Dans un deuxième temps, on s’intéresse davantage à la qualité de l’information. Ces deux phénomènes participent de la monétisation de l’information.
Journaliste, un métier remis en question
Le journaliste est la personne qui va chercher l’information afin de la partager sur papier, sur le web ou bien dans un reportage et il doit être capable de démasquer une fake news. « Le journaliste décide en partie de son information mais c’est au public de juger de son utilité ou de son importance », intervient Patrick Eveno, président de l’Observatoire de la déontologie de l’information. Il ajoute aussi qu’il n’existe pas de journaliste parfait, mais au contraire des amateurs, les professionnels vérifient la qualité de l’information.
Des moyens ont été mis en œuvre pour lutter contre ce phénomène de diffusion de masse
« L’infobésité déclenche de nouvelles routines cognitives pour éviter d’être noyé dans ce trop-plein d’information », explique Olivier Ertzscheid, auteur du livre « L’appétit des géants : pouvoir des algorithmes, ambition des plateformes ». Mais les systèmes de notifications incitent les utilisateurs à retourner au « travail » que leur assignent les plateformes, ou à ne plus décrocher de leurs smartphones. La question de l’éditorialisation est également vitale : à l’échelle des plateformes (réseaux sociaux), c’est un algorithme qui sélectionne l’information en fonction de ce qu’il connaît de nous grâce à nos recherches ou nos likes, qui décide de ce que nous pouvons voir et de ce qui est important pour nous. Mais personne ne sait vraiment comment fonctionne cet algorithme.
S’appuyer sur les nouvelles technologies pour rendre l’information attrayante
Les nouveaux dispositifs mis en place ont permis de répondre aux attentes des consommateurs de l’information. Aujourd’hui, le spectateur peut se mettre à la place du journaliste grâce à la vidéo 360 degrés et au journaliste immersif. Cette méthode, utilisée notamment lors d’un meeting d’Emmanuel Macron, Président de la République, permet d’avoir une vision plus large sur l’information transmise et donc, de mieux comprendre certains détails. « Grâce à cette nouvelle perspective de l’information, l’écriture journalistique évolue », ajoute Maëva Poulet, auteure du mémoire « Réalité virtuelle : le futur du journalisme ? ». Ce moyen permet aussi de « jouer sur l’émotion, ce qui fait aussi parti du métier de journaliste », conclut Patrick Eveno.
Trouver du contenu attractif n’est pas aussi simple que l’on peut l’imaginer. Un des principaux problèmes est le coût de réalisation. Les agences de presse s’interrogent sur la manière de financer l’information. « Tous nos journaux se sont mis sur le web à contre cœur car nous étions sceptiques face à la gratuité de l’information. Aujourd’hui, les sites web de nos journaux sont regroupés sur un même hébergeur (Actu.fr) pour améliorer notre référencement », annonce Catherine Wilmaert, directrice de journaux à PubliHebdos. Les usages ont évolué, il faut donc lier le journal papier et le journal web. Les journalistes sont incités à publier de l’information immédiate.
Face au modèle économique précaire, certains ont dû réfléchir à de nouveaux moyens de partager l’information. Thomas C.Durand, Co fondateur de la chaîne Youtube « La Tronche en Biais », explique qu’il fait appel aux dons pour financer son travail. « Les gens font des dons sur une vidéo parce que le sujet les engage », déclare-t-il. La diffusion de contenu est un moment délicat et exige d’avoir une grande responsabilité. En diversifiant les moyens de diffusion de contenus, les internautes n’ont plus l’impression que les médias sont manipulés ou « aux ordres ».
Le mot de la fin
Chaque intervenant a terminé la conférence par une courte réponse sur le thème de la conférence : le journalisme et l’information de demain.
Thomas C.Durand : « Les gens auront accès à toutes les informations qu’elles soient bonnes ou mauvaises. Il faut donc que les individus se créent une autonomie. »
Catherine Wilmart : « Le but principal est de trouver un moyen de monétiser l’information sur le web. »
Olivier Ertzscheid : « Il faut actuellement se pencher sur la question de l’éditorialisation algorithmique pour réussir à rendre explicite ce qui est caché. »
Jean-Marie Charon : « Les jeunes journalistes doivent être polyvalents et prendre des risques. Aujourd’hui, nous devons trouver des formules éditoriales innovantes »
Maëva Poulet : « La réalité virtuelle est une des méthodes journalistiques de demain même si aucune technologie ne peut remplacer les médias actuels. »
Patrick Eveno : « En revendiquant le droit du public à être informé, nous redonnons aussi une utilité du journaliste 》
Ludivine Bourgeais.