[#NOUS AVONS VU] Freud’s Last Session : quand la raison vacille face à l’inconnu

Dans Freud’s last session, deux intellectuels aux visions opposées se rencontrent à l’aube de la Seconde Guerre mondiale : Sigmund Freud et C.S. Lewis. Rencontre imaginée ou non — Freud ayant bel et bien reçu un jeune professeur d’Oxford peu avant sa mort —, le film plonge le spectateur dans les tourments intérieurs des personnages, au-delà d’un simple débat sur l’existence de Dieu.

La confrontation philosophique entre Freud et Lewis se déroule dans une atmosphère tendue, abordant la peur de la mort, les traumatismes de la guerre et la quête de sens dans un monde incertain. Les questions soulevées tout au long des 108 minutes rappellent que les grandes interrogations humaines traversent les époques et qui entrent en résonance avec notre présent.

Une exploration au-delà de la question de Dieu

Le film ne se limite pas au débat classique entre croyance et athéisme, bien qu’il soit central aux échanges entre Freud et Lewis. Le film explore aussi les dimensions intimes des deux personnages, notamment la relation complexe entre Freud et sa fille Anna. Cette relation, teintée de dépendance et de non-dits, illustre un lien toxique : Anna vit sous le poids de l’autorité et des attentes de son père, au détriment de ses relations personnelles. De son côté, Freud, rigide et intransigeant, cache sa propre vulnérabilité face à la mort imminente.

Le film aborde également les traumatismes liés aux guerres mondiales qui marquent les deux hommes. C.S. Lewis, vétéran de la Première Guerre mondiale, et Freud, réfugié fuyant le nazisme, sont hantés par la violence et la cruauté humaines. Ces expériences nourrissent leurs réflexions sur la condition humaine et le mal, un thème qui reste pertinent aujourd’hui. Ainsi, la souffrance, les souvenirs douloureux et les efforts pour surmonter un passé traumatisant sont des thèmes universels et intemporels.

La peur de la mort et le retour à la religion

Un des aspects fascinants du film est la façon dont Freud, devenu athée après une éducation pieuse, vacille face à la mort. Le film montre un Freud affaibli par un cancer de la mâchoire, sa maladie reflétant ses doutes : la mort, désormais tangible, le pousse à reconsidérer son rapport à Dieu. Freud ne redevient pas croyant, mais il reconnaît une part de mystère qui échappe à sa rationalité.

Ce retour vers la religion, même inconscient, peut être interprété comme une quête de réconfort face à l’angoisse de la finitude. Plutôt que de donner une réponse définitive sur l’existence de Dieu, le film explore la tension entre la recherche de sens et le doute, un dilemme universel qui interpelle chacun.

Des thématiques actuelles dans un contexte de guerre et d’incertitude

Le contexte de la Seconde Guerre mondiale renforce l’urgence des débats entre Freud et Lewis. L’incertitude face à l’avenir, la peur de la destruction et la violence d’un monde en guerre imprègnent chaque échange. Ce cadre historique souligne la pertinence des questions soulevées, car les interrogations sur l’existence de Dieu et le destin de l’humanité réapparaissent souvent en période de crise.

Aujourd’hui encore, les débats sur la foi, l’existence de Dieu et la place de la religion dans nos sociétés demeurent vifs. Le film montre que la quête de sens face au chaos et la difficulté de croire ou de ne pas croire sont des réponses à la souffrance humaine et à l’angoisse existentielle. Bien que situé dans un cadre historique précis, le dialogue entre Freud et Lewis transcende leur époque et résonne chez les spectateurs.

Une atmosphère empreinte de tensions, à la fois intime et mondiale.

Le Londres de 1939, sous la menace de la guerre, se reflète dans le huis clos du cabinet de Freud, où les échanges sont ponctués par la radio qui diffuse les nouvelles de l’avancée des troupes allemandes. Cette ambiance de fin du monde renforce l’idée que, face à l’inconnu et à la mort, même les esprits les plus rationnels cherchent une lumière dans l’obscurité.

Freud’s last session offre une réflexion profonde sur des thématiques universelles : la foi, la souffrance, la mort et la quête de sens. Le film dépasse la question de l’existence de Dieu pour aborder des préoccupations humaines plus larges et intemporelles. En situant cette confrontation philosophique dans un moment historique marqué par la peur et l’incertitude, il montre que les grandes questions de l’esprit humain trouvent leur urgence dans les périodes de crise, donnant à l’œuvre une résonance forte et émouvante chez les spectateurs contemporains.

Freud’s last session

Film de Matt Brown, 2023, 108 min
Angleterre VOSTF – Langue : anglais
Avec : Anthony Hopkins, Matthew Goode, Liv Lisa Fries
Diffusion : dimanche 20 octobre à 20h15 au Concorde 

Caroline Priam
Envoyée spéciale au Festival International du Film de la Roche-sur-Yon