[Critique] « We the animals », de Jeremiah Zagar – ce samedi à 16h au Concorde
Le film en 16 mm de Jeremiah Zagar, We the animals qui passe ce samedi 20 octobre au concorde à 16h suit le quotidien d’une famille new-yorkaise au travers de l’entrée dans l’âge adulte des trois garçons. Magique et vibrant.
Mam a 14 ans quand elle tombe enceinte de Paps, un portoricain de 17 ans. Elle aura ensuite Joël puis Jonah , qui raconte l’histoire. Mam travaille à l’usine, parfois de nuit. Paps est agent de sécurité, il scrute les caméras à la nuit tombée. Quand personne ne peut garder les enfants, paps les emmène dormir au travail. Les trois frères, règne le reste du temps sur le royaume qu’est le jardin et ses alentours. Quand ils n’ont pas à manger, ils volent dans les potagers voisins. Jusqu’au jour où ils tombent sur un adolescent blondinet tout droit arrivé de Philadelphie. Il va beaucoup influencé Jonah. Le petit, très sensible, éponge les centaines de sentiments auxquels il fait face dans ce tumulte familial. Est-ce cela qui le sauvera ? Est-ce cela qui le conduira à la folie? On suit l’évolution de ce petit bout d’homme confronté à un monde entier d’adultes. C’est une histoire de meute, où un enfant doit trouver sa place dans un monde tout sauf manichéen.
Lorsque l’on lit une autobiographie, on rentre entièrement dans la vie de l’auteur avec un sentiment de briser l’intimité, de regarder par le trou de la serrure. En regardant le film, je me suis rendue compte que je n’avais que jamais eu ce sentiment une fois retranscrit à l’écran, jusqu’à We the animals. Le réalisateur a réussi avec brio à nous intégrer au quotidien de Mam, Paps, Manny, Joël et Jonah.
En regardant ce film, j’ai eu la sensation étrange de retrouver de vieilles cassettes, ou bien ce genre de vidéos que l’on fait en vacances avec des gros plans sur ceux que l’on aime et où l’on capture tous les instants : les rires comme les pleurs. Seulement, lorsque le film de vacances se transforme en quotidien tumultueux entre chômage, usine, cris, disputes conjugales, amour, violence, et pauvreté, l’image prend une toute autre tournure. Malgré tout, c’est dans ce chaos que ressort la magie. Les images sont vibrantes. La caméra penchée sur Jonah nous fait ressentir mille frissons mêlés de peur, dégoût mais aussi tendresse et amour. Le son est capturé à la perfection. Il est puissant mais en subtilité, mêlant la narration du personnage principal aux cris de ses frères, aux disputes de ses parents et aux musiques latinos. Le mélange est habilement dosé.
Éva Dumand
Vous pouvez aussi lire le livre dont est tiré le film. Sorti en 2012, Vie animale est le premier roman de Justin Torres. Le livre est d’ailleurs disponible à la table des libraires du festival (CYEL).
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